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Les Cahiers de l'Égaré

Le cerf-volant de l'égaré N°2

21 Octobre 2023 , Rédigé par grossel Publié dans #le cerf-volant de l'égaré, #poésie, #écriture, #voyages, #pour toujours, #lettre

 

Le cerf-volant de l'égaré

magazine littéraire et artistique,

numérique et gratuit,

paraissant aléatoirement

sur le blog des Cahiers de l'Égaré

Envoyé par mail ou par la newsletter du blog

bandeau en cours de création / Saint-John Perse et son masque
bandeau en cours de création / Saint-John Perse et son masque

bandeau en cours de création / Saint-John Perse et son masque

Après Marie des Brumes, d'Odysseus Elytis, créée le 7 novembre 1985 à Châteauvallon, mise en scène Gil Royer, décor Michel Bories

la revue Aporie N° 5 est consacrée à Odysseus Elytis

il y eut Les tragédiennes sont venues, de Saint-John Perse, créées au Château de la Ripelle au Revest en  août 1986, mise en scène Dominique Lardenois, décor Jean-Miche Bruyère

la revue Aporie N° 8 est consacrée à Saint-John Perse et à la tragédie

quand les tragédiennes se sont dévêtues de leurs habits de scène et réclament de grandes oeuvres séditieuses, licencieuses; ah! les audacieuses, les délicieuses, les malicieuses / leur demande a été adressée en 1986 à 33 tragédiens et tragédiennes / aucun n'a répondu ni passer commande d'oeuvre séditieuse à un auteur / exception Dominique Lardenois a passé commande de la Lettre au directeur du théâtre à Denis Guénoun, éditée par Les Cahiers de l'Égaré, 2500 exemplaires ont circulé
quand les tragédiennes se sont dévêtues de leurs habits de scène et réclament de grandes oeuvres séditieuses, licencieuses; ah! les audacieuses, les délicieuses, les malicieuses / leur demande a été adressée en 1986 à 33 tragédiens et tragédiennes / aucun n'a répondu ni passer commande d'oeuvre séditieuse à un auteur / exception Dominique Lardenois a passé commande de la Lettre au directeur du théâtre à Denis Guénoun, éditée par Les Cahiers de l'Égaré, 2500 exemplaires ont circulé
quand les tragédiennes se sont dévêtues de leurs habits de scène et réclament de grandes oeuvres séditieuses, licencieuses; ah! les audacieuses, les délicieuses, les malicieuses / leur demande a été adressée en 1986 à 33 tragédiens et tragédiennes / aucun n'a répondu ni passer commande d'oeuvre séditieuse à un auteur / exception Dominique Lardenois a passé commande de la Lettre au directeur du théâtre à Denis Guénoun, éditée par Les Cahiers de l'Égaré, 2500 exemplaires ont circulé

quand les tragédiennes se sont dévêtues de leurs habits de scène et réclament de grandes oeuvres séditieuses, licencieuses; ah! les audacieuses, les délicieuses, les malicieuses / leur demande a été adressée en 1986 à 33 tragédiens et tragédiennes / aucun n'a répondu ni passer commande d'oeuvre séditieuse à un auteur / exception Dominique Lardenois a passé commande de la Lettre au directeur du théâtre à Denis Guénoun, éditée par Les Cahiers de l'Égaré, 2500 exemplaires ont circulé

le décor avec les émigrés ou migrants et les tragédiennes descendues par les ruelles vers le port et la Mer / deux titres importants de Denis Guénoun sur le théâtre
le décor avec les émigrés ou migrants et les tragédiennes descendues par les ruelles vers le port et la Mer / deux titres importants de Denis Guénoun sur le théâtre
le décor avec les émigrés ou migrants et les tragédiennes descendues par les ruelles vers le port et la Mer / deux titres importants de Denis Guénoun sur le théâtre
le décor avec les émigrés ou migrants et les tragédiennes descendues par les ruelles vers le port et la Mer / deux titres importants de Denis Guénoun sur le théâtre

le décor avec les émigrés ou migrants et les tragédiennes descendues par les ruelles vers le port et la Mer / deux titres importants de Denis Guénoun sur le théâtre

la tragédie n'est pas le drame dit l'édito / Car le drame est vulgaire, comme les actualités et leur urgence journalière, pâture des foules curieuses. Quand la tragédie est rare, où s'unissent l'existence et le théâtre, la vie et l'art, accordés par le malheur quintessencié et irrémédiable d'être. Oeuvre où se reconnait le destin, dépouillée des petitesses et pure de l'accessoire, la marque de la culture et du style. / dans les marges d'Aporie, les stars d'aujourd'hui / à leurs façons, ce sont des indisciplinaires, pas dans le moule, rétifs aux diktats, au conformisme / ils plaisent ou pas, sont dénigrés ou adulés mais ils tracent leur chemin de vie et d'artiste
la tragédie n'est pas le drame dit l'édito / Car le drame est vulgaire, comme les actualités et leur urgence journalière, pâture des foules curieuses. Quand la tragédie est rare, où s'unissent l'existence et le théâtre, la vie et l'art, accordés par le malheur quintessencié et irrémédiable d'être. Oeuvre où se reconnait le destin, dépouillée des petitesses et pure de l'accessoire, la marque de la culture et du style. / dans les marges d'Aporie, les stars d'aujourd'hui / à leurs façons, ce sont des indisciplinaires, pas dans le moule, rétifs aux diktats, au conformisme / ils plaisent ou pas, sont dénigrés ou adulés mais ils tracent leur chemin de vie et d'artiste

la tragédie n'est pas le drame dit l'édito / Car le drame est vulgaire, comme les actualités et leur urgence journalière, pâture des foules curieuses. Quand la tragédie est rare, où s'unissent l'existence et le théâtre, la vie et l'art, accordés par le malheur quintessencié et irrémédiable d'être. Oeuvre où se reconnait le destin, dépouillée des petitesses et pure de l'accessoire, la marque de la culture et du style. / dans les marges d'Aporie, les stars d'aujourd'hui / à leurs façons, ce sont des indisciplinaires, pas dans le moule, rétifs aux diktats, au conformisme / ils plaisent ou pas, sont dénigrés ou adulés mais ils tracent leur chemin de vie et d'artiste

l'adresse aux tragédiennes (14) et tragédiens (19) d'aujourd'hui (leurs noms sont dans les marges) pour qu'elles réclament des textes licencieux, séditieux / aucun ne nous a répondu / illustrations Valérie Anton, Nicole Budonaro, Michel Dufresne
l'adresse aux tragédiennes (14) et tragédiens (19) d'aujourd'hui (leurs noms sont dans les marges) pour qu'elles réclament des textes licencieux, séditieux / aucun ne nous a répondu / illustrations Valérie Anton, Nicole Budonaro, Michel Dufresne
l'adresse aux tragédiennes (14) et tragédiens (19) d'aujourd'hui (leurs noms sont dans les marges) pour qu'elles réclament des textes licencieux, séditieux / aucun ne nous a répondu / illustrations Valérie Anton, Nicole Budonaro, Michel Dufresne
l'adresse aux tragédiennes (14) et tragédiens (19) d'aujourd'hui (leurs noms sont dans les marges) pour qu'elles réclament des textes licencieux, séditieux / aucun ne nous a répondu / illustrations Valérie Anton, Nicole Budonaro, Michel Dufresne
l'adresse aux tragédiennes (14) et tragédiens (19) d'aujourd'hui (leurs noms sont dans les marges) pour qu'elles réclament des textes licencieux, séditieux / aucun ne nous a répondu / illustrations Valérie Anton, Nicole Budonaro, Michel Dufresne
l'adresse aux tragédiennes (14) et tragédiens (19) d'aujourd'hui (leurs noms sont dans les marges) pour qu'elles réclament des textes licencieux, séditieux / aucun ne nous a répondu / illustrations Valérie Anton, Nicole Budonaro, Michel Dufresne

l'adresse aux tragédiennes (14) et tragédiens (19) d'aujourd'hui (leurs noms sont dans les marges) pour qu'elles réclament des textes licencieux, séditieux / aucun ne nous a répondu / illustrations Valérie Anton, Nicole Budonaro, Michel Dufresne

risographie d'Ernest Pignon-Ernest pour radio zinzine, servant de couverture à l'essai de José Lenzini : Albert Camus et la prémonition des terrorismes, parution aux Cahiers de l'Égaré, le 1° novembre 2023, coïncidant avec le début de la guerre d'Algérie, 1° novembre 1954
risographie d'Ernest Pignon-Ernest pour radio zinzine, servant de couverture à l'essai de José Lenzini : Albert Camus et la prémonition des terrorismes, parution aux Cahiers de l'Égaré, le 1° novembre 2023, coïncidant avec le début de la guerre d'Algérie, 1° novembre 1954

risographie d'Ernest Pignon-Ernest pour radio zinzine, servant de couverture à l'essai de José Lenzini : Albert Camus et la prémonition des terrorismes, parution aux Cahiers de l'Égaré, le 1° novembre 2023, coïncidant avec le début de la guerre d'Algérie, 1° novembre 1954

à partir de ce N°2

sont partagées des contributions d'écrivains et artistes vivants

pour commencer :

- une lettre à Juliette Binoche (à télécharger)
voici ce que m'écrit l'épistolier :
"ma motivation n'est aucunement celle d'un fan ou d'un quelconque olibrius. Non.
La principale raison qui m'a poussé dans cette démarche est une révélation que je qualifie de spirituelle suite à la projection du film, Les amants du Pont-Neuf. J'avais déjà vu auparavant d'autres films avec Juliette Binoche. De très bons films. Mais je ne peux expliquer pourquoi et comment l'impact de celui-ci fut pour moi comme une élévation de mon âme. Je suis resté des mois et des mois sans pouvoir écrire une ligne dans le silence de ma maison. Je veux parler du silence de nos maisons intérieures . De celles que nous avons tous en nous. Nos maisons du silence ignorées, oubliées par tant de vacarme et d'agitation de ce monde dit moderne. Puis le confinement est arrivé avec enfin le passage à l'écrit. Le temps avait fait son travail. J'étais prêt. Le recueillement dans l'écriture pouvait enfin commencer."
 
- un mois de poèmes au jour le jour (à télécharger)
 
- des billets d'écrivain
 
- le début d'une BD, Nina la petite africaine
parrainée par Marcel Conche, créatrice au Burundi d'une coopérative agricole dans l'esprit de Pierre Rahbi, BD illustrée par Victor Kirista
 
- Ode à l'humanité suivi de Territoires de la Joie
de Nouria Rabeh, illustré par Katheline Goossens
 
- les robes de prière
d'Aïdée Bernard, réalisées au Japon
 
- la petite ouvrière métisse
de Sandrine-Malika Charlemagne
 
- quatre audios
mettant en jeu le corps dont Infinity par la tragédienne Irène Papas, sur une musique de Vangelis

Ma lettre à Juliette Binoche par Marcel Moratal, écrivain, animateur du Canard en bois, théâtre de 45 places dans la grange de sa ferme à Montréal-les sources, 1500 m

Ma lettre à Juliette Binoche

Madame,

Je ne sais pas si ces mots arriveront jusqu'à vous mais il me fallait absolument vous les écrire. J'ai mis beaucoup de temps avant de m'engager dans cette lettre. Je craignais de faire intrusion dans votre vie et de vous apparaître comme un olibrius qui veut se rendre intéressant. Écrire n'a jamais été une affaire facile pour moi. C'est un peu comme aller puiser de l'eau, descendre dans son propre puits et remonter vers la lumière pour séparer l'eau claire de la boue. Cela m'est venu d'un ordre intérieur dont je ne sais pas toujours très bien le pourquoi ni le vers quoi il m'emmène mais ce qui est certain c'est qu'il vient d'un besoin absolu.

Beaucoup de questions ont rapidement titillé mon esprit : quelle forme donner à cette lettre pour exprimer clairement son urgence et sa nécessité ? Pourquoi le choix sur votre personne ? Pourquoi vous ? Est-ce la vie qui nous engage dans nos actes, dans nos choix, ou nous-mêmes qui nous engageons dans la vie ? Y a t-il des passages obligés sur le chemin de notre existence ? Des croisements qui nous paralysent devant le choix à faire et sur la direction à prendre ? Qui est le guide ? Ou alors sommes-nous peut- être notre propre guide. À vrai dire je n'ai pas vraiment de réponse à ces questions. Chaque pas dans ma vie m'apporte son énigme.

L'écriture avec d'autres disciplines artistiques comme la peinture, la sculpture, la musique nous révèlent parfois peu à peu à nous-mêmes à notre grand étonnement. Mais nous ne finissons jamais de descendre dans notre puits. Chaque jour nous découvrons au fur et à mesure une nouvelle poupée russe au fond de notre être.

J'ai toujours été tracassé par la question de l'âme. Est-ce que l'âme est une envoyée de Dieu ? Quand on rend notre âme à qui la rend-on ? À Dieu ? Pourtant on m'a toujours dit que donner c'est donner et que reprendre c'est voler. La morale des hommes en fin de compte.

Je n'ai jamais eu l'âme d'un groupi. Enfant et adolescent je n'accrochais jamais les photos de mes artistes préférés dans ma chambre. Mes passions, mes coups de coeur et mes peines, je les gardais toujours secrètement au fond de moi. Peut-être par pudeur. Il paraît que les animaux se cachent pour mourir, moi je me cachais pour pleurer. En silence. Parce qu'un garçon ça ne devait pas pleurer. Çà c'était bon pour les filles. À cause d'une éducation très patriarcale on ne montrait pas trop ses sentiments. Le mot amour était un mot silencieux qu'on ne prononçait jamais. Nous ne parlions jamais des filles à la maison. Alors écrire est devenu pour moi un moyen de réveiller les mots silencieux pour leur faire prendre l'air sur les pages de ma vie et pour qu'ils défassent les noeuds que la vie m' avait parfois bien serrés. Fort. Très très fort. Dans le secret des mots, une petite voix intérieure me disait depuis longtemps d'y aller, me disait que je pouvais le faire et même, si je savais l'écouter au plus profond de moi- même, que je devais le faire.

.
Tout est parti d'une émission de radio. Vous parliez de la mélancolie et à un moment donné vous avez récité une prière orthodoxe, Le roi céleste :

« Roi céleste, Consolateur, Esprit de Vérité, Toi qui es partout présent et qui remplis tout, Trésor des Grâces et Donateur de Vie, Viens, et Demeure en nous, Purifie-nous de toute souillure, et Sauve nos âmes, Toi qui es Bonté. »

L'humilité de ce texte, l'appel au divin, m'ont fortement interpellé...

Marcel Moratal

Poèmes au jour le jour d'Alain Le Cozannet, ici du 15 septembre fin d'été au 16 octobre, début d'automne / La nature exige de moi des choses impossibles bravo je lui obéis de toutes mes forces : Histoire d’amour aux dimensions divines immersion ou baptême en mer tous les matins quel que soit le temps / c'est le genre de tragédien dont on aurait besoin si on était plus divin mais les temps sont terribles, monstrueux.

Poèmes de La Mitre

Alain Le Cozannet


Attentat.
la mer se montre à grand bruit
entre les doigts
une guêpe butine et pince
un cri invisible
s’élève dans le ciel
déchire l’air derrière les nuages.
La Mitre 15/09/2023.


Blasphème.
2 hangars béants
inertes vides noirs
à pied de mer
violette et blanche
arrachée vivante
aux vents invisibles.
La Mitre 16/09/2023.


Tempête.
silence force du bruit
tutus blancs
ballet d’écume
fumée noire
ferraille jaune.
La Mitre 17/09/2023.


Chant d’amour.
allongé sur le ventre
le bidon de gasoil
de son œil rouge
regarde l’atelier.
Auffan 17/09/2023.


Demain.
horizon noir
ciel et mer mangent le gris
les sombres bateaux de guerre
retiennent le temps
derrière une voile blanche
suspendue minuscule colombe.
La Mitre 20/09/2023.


Sous l’eau.
goélands cris étouffés
odeur lait de figue
monde inexplicable
magie de l’apesanteur.
La Mitre 20/09/2023.


Le bal des puissants.
le long du lazaret transfiguré
les monstres de guerre
se glissent lentement
dans la bataille sans vainqueur
des algues du sable et de la mer.
La Mitre 21/09/2023.


Moyen Âge.
dans la gueule noire du rocher
le porte-avions gris fer
l’index accusateur
pointé vers le ciel

La Mitre 21/09/2023.

 

 8 Photos

Monique Frémont (Perpignan)

photos Monique Frémont (Perpignan)
photos Monique Frémont (Perpignan)
photos Monique Frémont (Perpignan)
photos Monique Frémont (Perpignan)
photos Monique Frémont (Perpignan)
photos Monique Frémont (Perpignan)
photos Monique Frémont (Perpignan)
photos Monique Frémont (Perpignan)

photos Monique Frémont (Perpignan)

Billets

Alain Cadéo

Labyrinthe héréditaire

Si un de mes ancêtres, un certain Ramiro Rampinelli, fut disciple de Newton, un de mes oncles petit-fils de l’empereur Iturbide fusillé à cheval après deux ans de règne, un arrière grand-père Garibaldien, un autre grand-oncle Louis Barthou, ministre assassiné en 1934, moi je ne suis qu’un arrière petit-fils, peut-être, du très sérieux Buster Keaton. Même attirance pour les  locomotives et les bateaux à roue, des amours impossibles, des décors écroulés autour de nos minces silhouettes, et le même air surpris, sous de larges paupières, lèvres fines, bouche fermée, d’appartenir au Monde sans savoir d’où je viens ni même où je m'en vais. 

Nous sommes si souvent d’étranges parenthèses, porteurs d’inachevé, baluchons contenant un puzzle en vrac et sans doute incomplet. Et j’ai de plus en plus de mal à suivre et à traîner, ce convoi de légendes. 
Pantins des chromosomes, vérités et mensonges, nous nous éparpillons dans ce grotesque effort que nous faisons tous pour nous tirer du tapioca ou des sables mouvants d’une bien lourde hérédité. Être soi, rien que soi est terrible fadaise, surtout lorsqu’on trimballe un drôle de passé. Tenez-vous bien, il y avait qui plus est concernant notre nom de famille, un adage, une vieille sentence à vous paralyser, à vous flinguer plusieurs générations. Depuis des lustres dans nos plaines lombardes on disait: « Si les Cadéo se mettaient à faire des chapeaux, les gens, les pauvres, n’auraient plus qu’à marcher têtes nues ! » Et comment voulez-vous avec ça imaginer échapper un seul instant à la vindicte ou à la rigolade populaire! 
Il ne te reste plus qu’à faire ton tour de piste dérisoire et finir comme ce bon vieux Buster avec un mégot et un train électrique, dernier salut d'un canotier fabriqué par un autre, en attendant avec le même air triste sur un quai vide et à peine éclairé, le tortillard venu d’ailleurs, partant pour l’inconnu dans un panache de fumée.
 

Loups et chimères

Chaque matin ma meute attend fiévreusement que je libère sa puissante énergie. Ça geint, ça chougne, grogne, ça aboie, ça gémit. 
Un, les nourrir, les caresser, les flatter, les appeler chacun par leurs noms. Deux, les calmer, les rassurer, éviter qu’ils se mordent entre eux, leur promettre battue dans les fourrés et toute l’étendue de nos chasses aux idées. Trois, enfin les lâcher et tenter de les suivre alors qu’ils filent droit sur la piste électrique, pleine d’odeurs, du renard hérissé de secrets récoltés dans la nuit. 
Et ce sont courses folles, parfois désordonnées et il faut rappeler les hésitants, les égarés, les petits mots trop jeunes, inexpérimentés, perdus dans les genêts, poursuivant la bécasse ou bien le rat musqué. C’est l’alpha qu’il faut suivre, il ne se trompe pas et va droit sur la proie. Adroit, rusé, intelligent, il a un flair de tous les diables et ne se fourvoie pas. Mes loups, mes mots, sont faits de cet alphabet là. Qu’ils soient dans les bois de la torpeur, sur les collines de l'ivresse, les gorges de la mélancolie ou les sommets de la lucidité, ils fouinent, cherchent, lèvent le lièvre de la joie, débusquent le putois et ne se lassent pas de suivre le renard qui leur montre le mystérieux sillage d'argent que laissent les chimères dont personne ne voit ni ombre ni lumière, ni même le plus petit éclat. 
Sans ces chiens-là, ma meute, je suis déboussolé, perdu, ratatiné, ne sachant si j’écris ou sommeille dans la sombre forêt de tous mes mauvais rêves et d’un réel aussi cruel et vide que mon pire ennemi: l’insidieuse fadeur du désenchantement.

 
La déferlante et le bousier.
 
Sais-tu l’étrange calme qui habite ton cœur lorsqu’au petit matin tu disposes ta page sans rien savoir encore de tout ce qui viendra se jeter sous ta main? Tu vois venir quelques images. C’est aussi flou qu’une illusion ou un mirage sur une immense plaine, une savane, où tous les mots dans le lointain s’éveillent et s'ébrouent. Et toi, couché dans l’herbe sèche, tu guettes l’antilope craintive avançant pas à pas, museau mouillé, tournant la tête de tous côtés. Elle est la sentinelle, gracieuse annonciatrice d’un peuple, d’un troupeau, où toutes les espèces, un bataillon de mots, ruant, hennissant, rugissant, beuglant, déferlent, griffes, pattes, sabots, dans un nuage pulvérulent traversé de rais de lumières. C’est l’ostensoir des inspirés.
Fais gaffe à pas te faire piétiner! Cale toi bien contre un rocher! Laisse passer la horde et méfie toi du fauve au redoutable flair qui lui viendra lentement tourner autour de ta cachette. Une fois que tous seront passés, va cueillir les empreintes, les mille signes que ces bêtes ont laissé. Garde bien les odeurs, les sueurs, les vapeurs, toutes les sécrétions de ce grand peuple de passage. Car après leur ruée ta pleine page sera plaine bien sage où viendront picorer quelques grands échassiers et une troupe vernissée de scarabées sacrés.
 
Car enfin il s’agit d’habiter chaque mot, de le vivre, pour que l’écho qui nous revient soit le plus proche de sa source.
 
Je suis souvent frappé par le langage et le vocabulaire guerrier qu’adoptent les malades atteints d’un cancer. «Se battre, lutter pied à pied, gagner, tenir, résister, l’emporter, lui faire la peau, massacrer, écrabouiller, expulser… »  et tant d’autres… 
Je souhaiterais qu’avec la même ardeur et "en pleine santé" nous utilisions les mêmes mots contre l’ennemi larvé qui sommeille en nous-mêmes et dont nous tolérons tous les assauts contre ceux qui nous entourent sous l’infâme prétexte qu’il est le gardien enragé de notre pauvre et ridicule territoire. 
La vraie bonté (ou la béatitude), n’est-elle pas l’absolu renoncement à toute idée préconçue, comme un oubli de ce que nous croyons être, afin d’atteindre le délicieux vertige d’un permanent partage et d’un amour illimité? Mais quel chemin! Il n’est pas simple d’effacer sa lourdeur, ses réactions, le nœud coulant de nos hérédités. Disparaître en étant là, est un exercice quotidien de sublime acrobate glissant sur ce fil invisible entre la Terre et les Cieux.
 
 
Nina, la Joyeuse, l'auteur du récit / Victor Kirista, l'illustrateur de la BD à paraître pour avril 2024
Nina, la Joyeuse, l'auteur du récit / Victor Kirista, l'illustrateur de la BD à paraître pour avril 2024

Nina, la Joyeuse, l'auteur du récit / Victor Kirista, l'illustrateur de la BD à paraître pour avril 2024

NINA LA PETITE AFRICAINE


Bitaho : Le dernier rempart

Nina Nezerwe-Delorme

illustrateur Victor Kiritsa

Victor – laissez-moi vous expliquer,  

L’action se passe à Nyarusange village natal de Nina ; il est situé au cœur du Burundi qui est lui-même au cœur de l’Afrique. C’est ici qu’elle rencontra une trentaine de paysans qui se réunissaient après le travail des champs pour chercher à s’entraider. Nina à sa sortie de l’université Lumière de Bujumbura, décida de leur apporter son soutien. Sa première action fut de trouver des fonds pour construire une coopérative. C’est Fabien un simple paysan qui sait tout juste lire et écrire qui  lui proposa le nom de Bitaho, en kirundi cela veut dire « l’endroit où l’on se retrouve pour échanger, apporter et recevoir des connaissances. Un endroit où l’homme se ressource ».
Immergée dans cet univers paysan, elle se sent en résonnance avec la vie. C’est dans ce monde authentique que Nina ‘la petite africaine’ souhaite vous emmener. C’est avec toutes ces femmes merveilleuses, en contact avec une vie foisonnante , qu’ensemble, elles vont construire ce premier rempart face à cette mort galopante, la 6e extinction massive de la vie, qui chaque jour nous menace un peu plus.
Cet album est son histoire que j’ai eu le plaisir de partager avec elle. C’est aussi une mise en garde à tous ceux qui se prennent pour les maîtres du monde, aveuglés par cet anthropocentrisme.  
 
Victor

1. Victor –Alors au Burundi vous n’héritez pas du nom du père, vous êtes libres
de donner le nom que vous voulez ?
2. Nina – Exact , mon père, d’après ce que m’a dit ma mère ; me voyant
souriante et fort aimable,
3. Victor –Ce qui n’a pas changé !
4. Nina – C’est ça, il décida de me donner le nom de Nezerwe (ce qui veut dire en
Kirundi «
La joyeuse »
5. Victor –un jour tu m’expliqueras comment la joyeuse a vécu cette terrible
guerre civile entre les Tutsis et les Hutus qui allait se produire durant ton
enfance.
6. Nina –Toutes ses années sont gravées en moi, elles sont toujours là, c’est
pendant cette guerre civile, à l’âge de 8 ans, que j’ai perdu mon père.
7. Victor –d’après ce que ta mère m’a dit, la joyeuse ne voulait pas quitter les bras
de ses parents par peur de salir ses chaussures, c’est bien ça ?
8. Nina –exact, c’était peut-être une sorte de pressentiment, je me sentais encore
trop fragile pour poser les pieds sur ce monde en turbulence.
9. Victor –Ce n’est pas faux, mais tu as évolué, maintenant tu y mets et les pieds
et les mains !
10. Nina –Effectivement en agroécologie, il ne faut pas avoir peur d’y mettre les
mains, mais quand on sent que c’est la bonne voie, le travail semble léger.
11. Victor – c’est ce que disait Confucius « Choisis un travail que tu aimes, et tu
n'auras pas à travailler un seul jour de ta vie ».
12. Nina pourtant, chez vous en France, face au travail les réactions sont très
diverses, comment l’expliques-tu ?
13. Victor –La passion, l’amour ou le ressentiment changent le regard que nous
portons sur les choses de la vie, y compris le travail.
14. Nina –Sans aucun doute mais une occupation reste néanmoins un travail, qui
est parfois pénible !
15. Victor –Au-delà de la fatigue, il y a une multitude de facteurs qui entrent en
jeu, et personne n’y verra les mêmes choses.
16. Ils arrivent à la maison de la mère de Nina qui n’est pas là, son frère Billy les accueille
17. Nina –Bonjour Billy nous refaisions le monde à travers l’agroécologie avec
Victor ; si tu veux bien nous offrir à boire nous allons continuer sur la terrasse.
18. Billy –Tu parlais de ton projet de Niaruzangue ça avance ?
19. Nina –Toujours en attente.
20. Billy C’est un bon projet j’espère qu’il sera retenu.
21. Nina –Je l’espère aussi, car je découvre un peu plus, chaque jour, le lien étroit
entre l’agroécologie et la vie.
22. Victor –C’est vrai que la vie des plantes à des similitudes avec la vie des
hommes, comme le souligne le philosophe Émanuele Coccia. L’ignorer cela
fausse notre jugement.
23. Billy –et comment ça ?
24. Victor –Parce que les plantes sont les premières et les seules qui rendent la vie possible sur terre. Pénétrer le secret des plantes signifie comprendre le
monde, car tout est dans tout et surtout pas dans cet anthropocentrisme qui
nous caractérise trop.

 

 Une Ode à l'humanité suivi de Territoires de la Joie de Nouria Rabeh, illustré par Katheline Goossens, à paraître en 2023
 Une Ode à l'humanité suivi de Territoires de la Joie de Nouria Rabeh, illustré par Katheline Goossens, à paraître en 2023
 Une Ode à l'humanité suivi de Territoires de la Joie de Nouria Rabeh, illustré par Katheline Goossens, à paraître en 2023
 Une Ode à l'humanité suivi de Territoires de la Joie de Nouria Rabeh, illustré par Katheline Goossens, à paraître en 2023

Une Ode à l'humanité suivi de Territoires de la Joie de Nouria Rabeh, illustré par Katheline Goossens, à paraître en 2023

Poème au Dr Dauriac

(à Katheline Goossens)

Nouria Rabeh

Une dent s'en va, comme d'autres
marquées par l'usure du temps
d'une saison automnale
où les feuilles tombent
elles s'amoncellent
au pied des arbres nus
laissant derrière elles
l'empreinte d'une vie
une trajectoire qui suit
le cycle des naissances
comme un cri
où l'élan vital
s"amenuise peu à peu
pris par la lumière
du soleil couchant
vers l'inconnu
quand soudain
au matin du printemps
des bourdonnements
annoncent la rumeur du jour
et c'est la vie qui recommence
avec la douleur de naître
avant de la croquer
à pleines dents!

Nouria Rabeh
Ecrit le 22 juillet 2023

 

TERRITOIRES DE LA JOIE

Nouria Rabeh


Je laisse parfois
Mon esprit vagabonder
Au gré du vent
L’enfance douce
Rejaillit avec allégresse
De mon âme immémoriale
Comme un matin frais
Un chant bienveillant
De sa musique
S’étire sur le flanc
Des montagnes enneigées
Au regard du ciel
Qui, parfois
S’enrobe de nuages
Et laisse pourtant présager
Entre les mailles grises
Le scintillement
D’un soleil brillant.


Happée par le souffle géant
Des vagues océanes
Mugissement de voix
Dont la puissance
Et le flux s’activent
Dans le corps ouvert
D’une méduse éberluée
Captation soudaine
D’une dynamique vertueuse
Comme une machine ancestrale
Dotée d’un sentiment nouveau
Tourbillon de joie
Surgi des remous
De ce mécanisme bruyant
Une émotion des vagues
Comme l’envie d’étreindre
Une réalité essentielle
L’iode, les sels marins
Les sensations du grand large
Les cris des mouettes
Un monde où se côtoient
Algues et poissons
Multitude du vivant
Comme une envolée
Au-dessus des rochers
Le rythme d’une chanson
Qui m’emplit de gratitude.


Tu rayonnes, heureuse
L’espoir d’une hirondelle
Aux ailes subtiles
Le départ du lendemain
Vers d’autres contrées
Un horizon étranger
Loin de la mélancolie
L’enthousiasme à portée du cœur
Souris-en toi, une naissance
Le frôlement du soir venu
Comme dans un territoire
L’attente dans les airs
Bulle de son bec ouvert
Un jeu de lumières
Entre les branches
D’un arbre assoupi.


Terres de joie


Bercées par les feuilles
Allègement au cœur de l’été
Bien qu’assoiffées
La fraîcheur de tes plumes
Comme chaque matin
Petit moineau de douceur
Te fixe de bonne heure
Sueurs apparentes
Et malgré tout
Je ressens comme un refrain
Une dynamique
Un air joyeux
Amitiés réelles
Des compagnons invisibles
Me donnent le tempo
Pour construire ensemble
La cité des oiseaux.


Trêve passagère


D’un silence nocturne
Aux secrets mystérieux
Révélé par un orage
Longtemps pris
Dans la tourmente
Des incertitudes
Autrefois bannies
Des régions blanches
Ecrites en noir basané
En l’esclavage enchaîné
M’a appris à naviguer
En deçà des souffrances
Dans l’ancrage de l’histoire
Guidée par la lueur du phare
Dans la nuit profonde
Que le temps a fini par dénouer
Des vagues d’une possible joie.

les robes de prière de l'artiste Aïdée Bernard
les robes de prière de l'artiste Aïdée Bernard
les robes de prière de l'artiste Aïdée Bernard
les robes de prière de l'artiste Aïdée Bernard

les robes de prière de l'artiste Aïdée Bernard

La robe de prière

Aïdée Bernard, crée à partir des plantes locales, qu’elle

transforme en fibres de celluloses, les papiers qui vont

composer ses œuvres.

A l’invitation d’Imadate Art Field, elle a voulu rendre un

hommage au papier traditionnel, le washi. Il va servir de

base aux œuvres qu’elle a créées pendant la résidence.

On retrouve dans ses créations, l’empreinte et la forme du

tamis de bambou, la pureté de la fibre finement lissée par

son bercement dans la cuve d’eau et de néri.

Aïdée Bernard va ensuite ajouter d’autres fibres, qu’elle

glane dans le village ou sur le chemin du sanctuaire shinto

de kawakami gozen, la déesse du papier, dans la montagne

toute proche, tel l’aubier du cèdre du japon, des

graminées, le susuki, le kudzu, le chataîgner, le charme

houblon, etc.
Toutes en textures et en teintes naturelles, issues des

végétaux.

Créer un vêtement c’est créer son chez soi, sa protection

et son apparat en même temps.

Consciente de la dérive des productions humaines

actuelles, qui cherchant toujours à exploiter pour dégager

un profit à court terme, ne parviennent pas à trouver un

équilibre écologique, Aïdée Bernard nous invite à

reconsidérer notre rapport à la Nature à travers des

vêtements de fibres de plantes, digne d’une déesse du

papier !

Et si nous revêtions la puissance d’un vêtement de

Nature ? Et si nous reprenions conscience que nous

sommes une part de cette nature et qu’abîmer notre

monde c’est aussi nous abîmer ?

Ainsi est ma prière, pour que de l’anthropocentrisme actuel

puisse naître les mondes de demain, où chaque être

végétal, animal ou même minéral puisse coexister.

Pourra t-on voir la puissance d’une telle prière ?
 

 

 

Nue je suis née

Sandrine-Malika Charlemagne

Pour avoir chanté seins nus

A sa fenêtre

Elle se fera conspuer

Vouer aux gémonies

 

Pour avoir chanté la liberté

Je fais comme je veux

Quand je veux

Si je veux

 

Sous le soleil

Sur les vagues

Sur le sable chaud

Electrisée par les embruns

Entre les bottes de foin

Ou de paille

Au creux des dunes

A m’en brûler la peau

De désir

A en crier dans la cabine du train

De nuit, Vienne-Oslo

 

Et l’on dira d’elle

Pauvre déséquilibrée

Elle va trop loin

Quelle indécence

 

Mais dans ses yeux à elle

Persiste l’incandescence

 

Je vous salue

Les pince-fesses

Trous béants de la pensée

Où ne perce de lumière

Que la noirceur de vos tabous

Qui êtes-vous

Pour lancer vos anathèmes ?

Je me fous de vos interdits

 

Nue je suis née

Nue je partirai

Nue je vous enlace

Je vous embrasse

Et baise vos mains

Nue comme le ver de la pomme

 

Si vous cherchez à m’emprisonner

Au nom de ce dieu tout puissant

Je vous rappelle le jour de ma naissance

Le jour de notre naissance

A nous toutes femmes de toutes les civilisations

La nudité est un pur joyau

Plus pur que l’air vicié

De vos prisons

Plus pur que vos paroles

D’où rien de sacré ne jaillit

En vérité

 

Notre nudité

A la grâce de Dieu

Est un diadème

Une toile sublime

Où il fait bon voyager

Où l’imagination

N’a de cesse de battre

Tel un cœur affolé

Où chacun y puise

Le repos dont il a besoin

 

Notre nudité

Notre voile d’éternité

 

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